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Entre réalisme et constructivisme

On peut parler de réalisme scientifique (au sens sémantique) si l'on pense que nos concepts scientifiques dépendent essentiellement de la réalité qu'ils visent. Ainsi je suis réaliste à propos des électrons si je pense que le concept d'électron dépend essentiellement d'éléments de la réalité, ceux dont je parle quand je parle d'électrons (bien sûr il conviendrait de clarifier cette idée de référence sémantique, mais je ne m'étendrait pas la dessus). La position réaliste n'implique pas que les aspects externes aux objets étudiés, par exemple des aspects sociaux ou psychologiques, ne jouent aucun rôle en science. On peut penser, par exemple, que certaines contraintes sociales opèrent une sélection sur les concepts et domaines qu'on juge intéressants ou non d'étudier. Cependant pour le réaliste, ces aspects n'impactent pas de manière essentielle la représentation que nous nous faisons des électrons, ou de tout autre objet théorique, mais seulemen...

Problème moral et introspection -- suite

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Afin de clarifier l' analogie entre le problème moral et le problème de l'introspection que j'évoquais dans l'article précédent, je me suis fendu d'un petit schéma (réalisé avec le logiciel inkscape -- cliquer pour agrandir) : La flèche intitulée « action » exprime la psychologie humienne : être motivé à agir, c'est avoir un désir et une croyance pratique associée à la réalisation de ce désir. Le problème moral tel qu'exprimé par Smith provient du fait qu'une croyance morale semble a elle seule induire une motivation. La solution de Smith est illustrée par la flèche intitulée « ajustement moral » : une croyance morale induit en fait une modification des désirs. La flèche intitulée « perception » exprime le fait que pour fonder une croyance nouvelle sur la base de données sensibles, il faut non seulement un aspect phénoménal associé à ces données, mais aussi une certaine attitude motivationnelle (ne serait-ce qu'une attention portée à l...

Analogie entre le problème morale et le problème de l'introspection

Dans « The moral problem », Smith présente ce qu'il considère être le problème central en méta-éthique, à savoir le rapport entre la praticité et l'objectivité des faits moraux : si on pense que les faits moraux sont objectifs, pourquoi « doit »-on les respecter ? Il pose le problème sous forme d'un trillemme : (1) les jugements moraux sont des croyances à propos de faits objectifs (objectivité) (2) un jugement moral implique à lui seul une certaine motivation à agir (praticité) (3) la motivation à agir suppose un désir (en plus d'une croyance pratique qu'agir de telle sorte permettra de combler ce désir) (psychologie humienne) Ces trois affirmations semblent incohérentes, puisqu'un jugement moral seul peut nous motiver à agir sans pour autant constituer un désir, contrairement à la psychologie humienne. Il me suffit apparemment de croire que donner à la charité est une bonne chose pour être réellement motivé à le faire (en dehors de motivations contrai...

Le débat Lordon/Bohler : sociologie et neurosciences

La dernière émission d'arrêt sur image qui portait sur les événements récents concernant Chypre [accès payant] fut l'occasion d'un débat dans le débat entre Sebastien Bohler et Frédéric Lordon, qui, de mon point de vue intéressé, était le passage le plus intéressant de l'émission. [EDIT]Quelques modifications ont été apportées suite au revisionnage de l'émission [/EDIT] Tout commence par la chronique de Bohler [accès libre] qui nous propose un bout d'explication neuropsychologique aux paniques bancaires à travers l'anxiété générée par les médias, qui, par un processus d'accumulation, pourrait mener à la panique : des images captant l'attention du téléspectateur et un discours anxiogène en voix off, perçu inconsciemment par le cerveau, augmenteraient le taux de certaines hormones dans le cerveau qui, dépassant un certain seuil, provoquent la panique. A la suite de cette chronique, Lordon est embêté. Il ne veut pas être désobligeant, mais lui lutt...

Note de lecture – everything must go : metaphysics naturalised.

J'ai été plutôt surpris en bien au commencement de ma lecture de ce livre, dont j'avais déjà lu quelques commentaires m'ayant laissé penser qu'il devait s'agir d'une sorte de traité de scientisme « hard-core » qui prétendrait reléguer la métaphysique, ou bien la philosophie tout entière, aux oubliettes (après tout le premier chapitre s'intitule « in defence of scientism »). En fait il s'agit bien de faire de la métaphysique, et au final je me suis trouvé plutôt en accord avec les auteurs (Don Ross, James Ladyman et David Spurrett), du moins jusqu'à un certain point. Je propose ici un résumé du livre, suivi d'une brève discussion.

Darwinisme généralisé, téléologie et causalité mentale

– Le darwinisme permet de se passer de la téléologie comme processus d'évolution. Une espèce est adaptée à son environnement non pas parce qu'elle (ou quelqu'un d'autre) a voulu qu'elle soit adaptée, mais parce qu'une sélection s'est effectuée sur les individus de cette espèce qui l'a en quelque sorte modelée conformément à son environnement. Il n'y a pas de but dans la nature, l'évolution est aveugle. – Peut-être bien. Mais dans le domaine du mental, par contre, on ne semble pas pouvoir se passer de la téléologie. A l'évidence nous formons des buts et agissons en conséquence. – Est-ce bien vrai, ou refuse-t-on de s'en passer parce qu'on est trop impliqué et que ça infligerait une blessure trop grande à notre ego ? Tu connais les expériences de Benjamin Libet, qui prédisent l'action d'un individu plusieurs secondes avant la décision consciente qui lui correspond, simplement en observant le champs électrique du cerveau. Peut...

Bienvenu au Loukhistan !

Je viens de terminer de remanier mon utopie économique : Bienvenu au Loukhistan ! Les commentaires critiques sont plus que bienvenus (notamment si vous êtes spécialistes en économie...)