Le moi, entre structure et liberté
Suis-je une structure ou un processus ? Ou la rencontre des deux ?
Le moi subjectif
En chaque instant j’ai une expérience de la réalité. Le premier moi que l’on puisse identifier, c’est le moi du cogito, le sujet de l’expérience. Mais si mon expérience comprend mes pensées, mes idées, mes sentiments autant que mes perceptions sensorielles, en quoi les premières appartiennent-elles à mon moi plus que les dernières ? En quoi puis-je savoir si les premières sont une référence à quelque chose d'extérieur et non les dernières ?
Car mes sensations sont elles-aussi une représentation qui m’est propre, qui bien que supposément corrélé à un "extérieur", n’en est pas moins une représentation mentale (comme l’attestent les illusions d’optique). Il n’est jamais rien qui m’apparaisse directement. En quoi donc pourrais-je les différencier de mes émotions ? Mes émotions ne sont-elles pas elle-même une perception/représentation d’un extérieur ? De même mes idées, qui sont capables d’influer sur ma représentation (comme l’attestent les images ambigües que je peux voir suivant ma volonté), qu’on peut considérer comme perception de concepts : qu’est-ce qui différencie ces concepts perçus d’autres objets perçus ? N’est-ce pas là des éléments de la réalité au même titre ? En tant que sujet, ne suis-je pas aussi bien les unes que les autres, ne suis-je pas la totalité de mon expérience ?
Or cette expérience est changeante : mes sensations sont faites de choses qui vont et viennent, qui me surprenne ou que je reconnais. En l'absence d'une démarcation, si vraiment je suis la totalité de mon expérience, alors il n'y a rien dans cette expérience en renouvellement permanent qui me caractérise de manière définitive, aucune stabilité qui puisse réellement me définir. Tout au plus il y a, en général, une certaine continuité entre mes états.
Ce que j’appelle mon identité appartient au monde, ce n’est pas moi. Moi, je ne suis qu’un point de vue sur le monde, ou plutôt une succession continue de points de vue instantanés, c'est à dire un flux d’interaction sur le monde, perception et intention mêlés -- ce que Bergson appelait le flux de la conscience. Et de ces points de vue successifs, "mon monde" est aussi bien constitué de représentations de choses extérieures que de mes états d’âme, de manière indistincte.
Donc selon ce premier moi, qui est pure subjectivité, il n’est rien qui puisse m’identifier comme quelque chose de stable, et rien qui ne puisse distinguer ce qui m’est propre de ce qui est extérieur. Je suis une succession d’instants, qu’on ne peut rapprocher que par leur ressemblance relative, d’un instant à l’autre, par une forme de continuité. Mais est-ce que justement il ne faut pas invoquer une identité, sous quelque forme, pour expliquer cette continuité de ressemblance ?
Le moi identitaire
Le second "moi" qui s’oppose à ce premier moi est mon identité. Il regroupe l’ensemble de mes dispositions à agir, ma personnalité, ma mémoire, mes idées, mes émotions, mon corps, par opposition à un monde extérieur. Mais contrairement au premier moi qui est irrémédiablement sujet, qui "existe", celui-ci est un objet, une représentation de moi même, que je construit en interaction avec les autres et avec le monde. C’est une fiction, au même titre que n’importe quel objet est toujours une fiction. Cette table peut très bien voir ses pièces remplacées successivement, elle n’aura plus rien de commun avec ce qu’elle était, si ce n’est en tant que je me la représente comme cette table. De même, il se peut que les cellules de mon corps se renouvellent entièrement, pourtant ce sera toujours mon corps. La stabilité, l'unité, n'est pas dans l'objet mais dans sa représentation. Mon identité n'est donc pas autre chose qu'une représentation de moi-même.
Si en effet je parviens à établir une démarcation entre moi et l'extérieur, ce n'est pas en vertu d'une différence d'essence entre ce qui m'appartient et ce qui ne m'appartient pas -- on l'a vu, tout n'est pour moi qu'expérience. C'est donc essentiellement par le jugement que j'y parviens. Il semble que certaines choses sont mieux conçues comme m'étant propres (parce qu'elles me suivent) tandis que d'autres sont mieux conçues comme m'étant extérieures. Mais ces distinctions peuvent varier (par exemple, le schizophrène, ou celui qui croit en la télépathie, considère certaines des pensées qu'il perçoit comme extérieures).
Ainsi de l'expérience pure, ou plutôt au sein de cette expérience, nait une représentation, une structure, qui établit et stabilise une démarcation plus ou moins arbitraire entre un moi et un monde extérieur. L'identité émerge au sein de la représentation du monde, et c'est elle qui ensuite permettra la continuité de l'expérience, qui servira de point de repère. On peut d'ailleurs suspecter que cette identité est d’abord fondée par les autres quand on est enfant avant de nous être transmise par le langage, puis adoptée ou parfois subie, renforcée par le regard des autres, plus ou moins maîtrisée, affirmée, voire ensuite travaillée, sculptée, sublimée.
Contrairement au premier "moi", celui-ci n’est pas une succession d’instantanés mais à l'inverse un référentiel stable qui me permet de me définir. Il correspond finalement à ce qu’on entend couramment par "identité". Il n’est pas étonnant que ce soit cette identité qui prévale dans le sens commun, puisqu’au contraire de la première, évanescente, elle est une chose stable que l’on peut identifier, conceptualiser -- ce qui est précisément une fonction du langage, dont elle est le produit. C'est donc évidemment à elle qu'on fait référence. Mais surtout, cette identité, c’est "nous", comme on dit, quand on a construit sa propre maison, "cette maison, c’est moi". Nous la construisons en interaction avec le monde, elle est ce qu’on en fait.
La conscience, rencontre des moi
En effet cette représentation ne serait rien si elle n'était pas représentée. Elle n'existerait pas. S'il nous semble à un moment donné que la structure est tout ce qui existe, tout ce qu'il y a de réel, et que le sujet n'en est qu'un épiphénomène, c'est par une étrange myopie qui nous fait oublier que cette stabilité n'est elle même qu'une fiction, une croyance en la stabilité, qui n'existe qu'au sein d'une expérience. Ainsi la structure se situe à l'intérieur du flux de l'expérience au moins autant que l'expérience a lieu à l'intérieur d'une structure. L'un et l'autre se donnent naissance -- ma volonté est à la source de la structure quand activement "je me représente", et c’est cette représentation, une fois formée, qui en retour déterminera ce qu’est "mon monde". L'ensemble de mes représentations aujourd'hui stabilisées sont le fruit d'une expérience subjective passées, elles se sont construites et renforcées par cette expérience, et ce sont elles qui aujourd'hui définissent les termes de mon expérience présente, au cours de laquelle je construit, sur cette base, de nouvelles représentations. La conscience est ce dialogue permanent entre une structure plongée dans le monde et un sujet.
Si certaines décisions sont d'autant plus faciles à prendre qu'on y a réfléchit, au point qu'elles semblent, a posteriori, contradictoires avec la liberté (car à la réflexion, c'était bien la seule chose à faire), c'est justement parce que la réflexion est ce processus de formation et de renforcement de nos représentations qui déterminent ensuite nos choix. Mais ne nous y trompons pas, le processus lui même est conscient, dirigé par l'intentionnalité.
La conscience a ceci de mystérieux qu’elle repose sur chacun de ces deux moi. Il ne suffit pas d’être un sujet pour être conscient, il faut aussi savoir qui l’on est. S’il n’y avait pas ce flux de subjectivité, bien entendu, je ne serai pas véritablement conscient. Mais s’il n’y avait pas cette identité, cette représentation stable de moi même, comment pourrais-je l’être ? Si l’existence n’était qu’une succession d’instantanés sans fondements, comment pourrais-je dire "je suis conscient", sachant ce que ce "je" implique en terme de séparation entre moi et le "monde extérieur", c’est à dire en terme de contenu représentationnel ? Pourtant un tel contenu sans le sujet qui l'habite serait tout sauf vivant. Une structure qui n'est que structure -- si tant est qu'une telle chose existe en dehors du regard d'un sujet -- est une chose morte, une machinerie. Seule une structure en évolution et déterminant sa propre évolution est vivante. Le moi conscient ne peut naître que d’une représentation subjective de soi, c’est à dire de la rencontre de ces deux moi : le sujet de l’expérience et l’objet de la représentation de soi. Sujet pour exister, objet pour pouvoir être identifié.
Conclusion
Nous avons analysé dans le précédent article les liens entre connaissance et liberté. De nouveau on voit que l’existence est un jeu subtile entre une composante structurelle, statique, et une composante intentionnelle dynamique. La structure (la mémoire, la conceptualisation, la représentation) seule permet d’assurer la persistance de l’identité, la stabilité sans laquelle la liberté du sujet n’aurait aucun sens, aucun fond sur lequel être libre. Pour reprendre une image de Wittgenstein, ce sont les gonds sur lesquels on fixe une porte qui peut alors tourner librement. Cependant cette structure est elle même construite par le sujet et sa rencontre avec le monde. Elle n'acquière d'existence qu'à travers lui. Elle se cristallise lors de l'expérience, puis se sédimente ou s'érode, comme si par un phénomène rétroactif, la structure-objet s’offrait les moyens de son propre renouvellement, et le sujet-volonté les moyens de sa propre stabilisation.
Une dernière question reste irrésolue : au fond, qu'est-ce qui existe "réellement" ? Est-ce la structure ou le processus ? Peut-on ramener l'un à l'autre ? Ou faut-il être dualiste ? D'un certain point de vue, la structure semble être illusoire : tout n'est qu'expérience, tout est en évolution constante, toute stabilité est fictive, seulement relative à une représentation qui elle même est en évolution. Sans dynamique, pas de temps. D'un autre point de vue, c'est le processus qui semble fictif : il n'est que l'effet de la structure qui lui donne naissance et définit son contenu. Sans rien de statique, sans points de repères, point de contenu qui puisse évoluer... Il faudra sans doute en passer par la science pour se faire une idée plus précise des relations entre persistance et dynamisme (et au passage, affiner cette notion de représentation, à cheval sur le monde objectif et subjectif). Ce sera sans doute l'objet d'un futur article.
Le moi subjectif
En chaque instant j’ai une expérience de la réalité. Le premier moi que l’on puisse identifier, c’est le moi du cogito, le sujet de l’expérience. Mais si mon expérience comprend mes pensées, mes idées, mes sentiments autant que mes perceptions sensorielles, en quoi les premières appartiennent-elles à mon moi plus que les dernières ? En quoi puis-je savoir si les premières sont une référence à quelque chose d'extérieur et non les dernières ?
Car mes sensations sont elles-aussi une représentation qui m’est propre, qui bien que supposément corrélé à un "extérieur", n’en est pas moins une représentation mentale (comme l’attestent les illusions d’optique). Il n’est jamais rien qui m’apparaisse directement. En quoi donc pourrais-je les différencier de mes émotions ? Mes émotions ne sont-elles pas elle-même une perception/représentation d’un extérieur ? De même mes idées, qui sont capables d’influer sur ma représentation (comme l’attestent les images ambigües que je peux voir suivant ma volonté), qu’on peut considérer comme perception de concepts : qu’est-ce qui différencie ces concepts perçus d’autres objets perçus ? N’est-ce pas là des éléments de la réalité au même titre ? En tant que sujet, ne suis-je pas aussi bien les unes que les autres, ne suis-je pas la totalité de mon expérience ?
Or cette expérience est changeante : mes sensations sont faites de choses qui vont et viennent, qui me surprenne ou que je reconnais. En l'absence d'une démarcation, si vraiment je suis la totalité de mon expérience, alors il n'y a rien dans cette expérience en renouvellement permanent qui me caractérise de manière définitive, aucune stabilité qui puisse réellement me définir. Tout au plus il y a, en général, une certaine continuité entre mes états.
Ce que j’appelle mon identité appartient au monde, ce n’est pas moi. Moi, je ne suis qu’un point de vue sur le monde, ou plutôt une succession continue de points de vue instantanés, c'est à dire un flux d’interaction sur le monde, perception et intention mêlés -- ce que Bergson appelait le flux de la conscience. Et de ces points de vue successifs, "mon monde" est aussi bien constitué de représentations de choses extérieures que de mes états d’âme, de manière indistincte.
Donc selon ce premier moi, qui est pure subjectivité, il n’est rien qui puisse m’identifier comme quelque chose de stable, et rien qui ne puisse distinguer ce qui m’est propre de ce qui est extérieur. Je suis une succession d’instants, qu’on ne peut rapprocher que par leur ressemblance relative, d’un instant à l’autre, par une forme de continuité. Mais est-ce que justement il ne faut pas invoquer une identité, sous quelque forme, pour expliquer cette continuité de ressemblance ?
Le moi identitaire
Le second "moi" qui s’oppose à ce premier moi est mon identité. Il regroupe l’ensemble de mes dispositions à agir, ma personnalité, ma mémoire, mes idées, mes émotions, mon corps, par opposition à un monde extérieur. Mais contrairement au premier moi qui est irrémédiablement sujet, qui "existe", celui-ci est un objet, une représentation de moi même, que je construit en interaction avec les autres et avec le monde. C’est une fiction, au même titre que n’importe quel objet est toujours une fiction. Cette table peut très bien voir ses pièces remplacées successivement, elle n’aura plus rien de commun avec ce qu’elle était, si ce n’est en tant que je me la représente comme cette table. De même, il se peut que les cellules de mon corps se renouvellent entièrement, pourtant ce sera toujours mon corps. La stabilité, l'unité, n'est pas dans l'objet mais dans sa représentation. Mon identité n'est donc pas autre chose qu'une représentation de moi-même.
Si en effet je parviens à établir une démarcation entre moi et l'extérieur, ce n'est pas en vertu d'une différence d'essence entre ce qui m'appartient et ce qui ne m'appartient pas -- on l'a vu, tout n'est pour moi qu'expérience. C'est donc essentiellement par le jugement que j'y parviens. Il semble que certaines choses sont mieux conçues comme m'étant propres (parce qu'elles me suivent) tandis que d'autres sont mieux conçues comme m'étant extérieures. Mais ces distinctions peuvent varier (par exemple, le schizophrène, ou celui qui croit en la télépathie, considère certaines des pensées qu'il perçoit comme extérieures).
Ainsi de l'expérience pure, ou plutôt au sein de cette expérience, nait une représentation, une structure, qui établit et stabilise une démarcation plus ou moins arbitraire entre un moi et un monde extérieur. L'identité émerge au sein de la représentation du monde, et c'est elle qui ensuite permettra la continuité de l'expérience, qui servira de point de repère. On peut d'ailleurs suspecter que cette identité est d’abord fondée par les autres quand on est enfant avant de nous être transmise par le langage, puis adoptée ou parfois subie, renforcée par le regard des autres, plus ou moins maîtrisée, affirmée, voire ensuite travaillée, sculptée, sublimée.
Contrairement au premier "moi", celui-ci n’est pas une succession d’instantanés mais à l'inverse un référentiel stable qui me permet de me définir. Il correspond finalement à ce qu’on entend couramment par "identité". Il n’est pas étonnant que ce soit cette identité qui prévale dans le sens commun, puisqu’au contraire de la première, évanescente, elle est une chose stable que l’on peut identifier, conceptualiser -- ce qui est précisément une fonction du langage, dont elle est le produit. C'est donc évidemment à elle qu'on fait référence. Mais surtout, cette identité, c’est "nous", comme on dit, quand on a construit sa propre maison, "cette maison, c’est moi". Nous la construisons en interaction avec le monde, elle est ce qu’on en fait.
La conscience, rencontre des moi
En effet cette représentation ne serait rien si elle n'était pas représentée. Elle n'existerait pas. S'il nous semble à un moment donné que la structure est tout ce qui existe, tout ce qu'il y a de réel, et que le sujet n'en est qu'un épiphénomène, c'est par une étrange myopie qui nous fait oublier que cette stabilité n'est elle même qu'une fiction, une croyance en la stabilité, qui n'existe qu'au sein d'une expérience. Ainsi la structure se situe à l'intérieur du flux de l'expérience au moins autant que l'expérience a lieu à l'intérieur d'une structure. L'un et l'autre se donnent naissance -- ma volonté est à la source de la structure quand activement "je me représente", et c’est cette représentation, une fois formée, qui en retour déterminera ce qu’est "mon monde". L'ensemble de mes représentations aujourd'hui stabilisées sont le fruit d'une expérience subjective passées, elles se sont construites et renforcées par cette expérience, et ce sont elles qui aujourd'hui définissent les termes de mon expérience présente, au cours de laquelle je construit, sur cette base, de nouvelles représentations. La conscience est ce dialogue permanent entre une structure plongée dans le monde et un sujet.
Si certaines décisions sont d'autant plus faciles à prendre qu'on y a réfléchit, au point qu'elles semblent, a posteriori, contradictoires avec la liberté (car à la réflexion, c'était bien la seule chose à faire), c'est justement parce que la réflexion est ce processus de formation et de renforcement de nos représentations qui déterminent ensuite nos choix. Mais ne nous y trompons pas, le processus lui même est conscient, dirigé par l'intentionnalité.
La conscience a ceci de mystérieux qu’elle repose sur chacun de ces deux moi. Il ne suffit pas d’être un sujet pour être conscient, il faut aussi savoir qui l’on est. S’il n’y avait pas ce flux de subjectivité, bien entendu, je ne serai pas véritablement conscient. Mais s’il n’y avait pas cette identité, cette représentation stable de moi même, comment pourrais-je l’être ? Si l’existence n’était qu’une succession d’instantanés sans fondements, comment pourrais-je dire "je suis conscient", sachant ce que ce "je" implique en terme de séparation entre moi et le "monde extérieur", c’est à dire en terme de contenu représentationnel ? Pourtant un tel contenu sans le sujet qui l'habite serait tout sauf vivant. Une structure qui n'est que structure -- si tant est qu'une telle chose existe en dehors du regard d'un sujet -- est une chose morte, une machinerie. Seule une structure en évolution et déterminant sa propre évolution est vivante. Le moi conscient ne peut naître que d’une représentation subjective de soi, c’est à dire de la rencontre de ces deux moi : le sujet de l’expérience et l’objet de la représentation de soi. Sujet pour exister, objet pour pouvoir être identifié.
Conclusion
Nous avons analysé dans le précédent article les liens entre connaissance et liberté. De nouveau on voit que l’existence est un jeu subtile entre une composante structurelle, statique, et une composante intentionnelle dynamique. La structure (la mémoire, la conceptualisation, la représentation) seule permet d’assurer la persistance de l’identité, la stabilité sans laquelle la liberté du sujet n’aurait aucun sens, aucun fond sur lequel être libre. Pour reprendre une image de Wittgenstein, ce sont les gonds sur lesquels on fixe une porte qui peut alors tourner librement. Cependant cette structure est elle même construite par le sujet et sa rencontre avec le monde. Elle n'acquière d'existence qu'à travers lui. Elle se cristallise lors de l'expérience, puis se sédimente ou s'érode, comme si par un phénomène rétroactif, la structure-objet s’offrait les moyens de son propre renouvellement, et le sujet-volonté les moyens de sa propre stabilisation.
Une dernière question reste irrésolue : au fond, qu'est-ce qui existe "réellement" ? Est-ce la structure ou le processus ? Peut-on ramener l'un à l'autre ? Ou faut-il être dualiste ? D'un certain point de vue, la structure semble être illusoire : tout n'est qu'expérience, tout est en évolution constante, toute stabilité est fictive, seulement relative à une représentation qui elle même est en évolution. Sans dynamique, pas de temps. D'un autre point de vue, c'est le processus qui semble fictif : il n'est que l'effet de la structure qui lui donne naissance et définit son contenu. Sans rien de statique, sans points de repères, point de contenu qui puisse évoluer... Il faudra sans doute en passer par la science pour se faire une idée plus précise des relations entre persistance et dynamisme (et au passage, affiner cette notion de représentation, à cheval sur le monde objectif et subjectif). Ce sera sans doute l'objet d'un futur article.
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