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Affichage des articles du 2018

Pistolets sur la tempe et degrés de crédence

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Lê et Monsieur Phi publient des vidéos youtube super intéressantes sur plein de sujets (l’intelligence artificielle, la morale, le réalisme sémantique) ainsi que de longues discussions (sur la chaîne Axiome ). Autant je trouve leur vidéos passionnantes, autant je suis parfois en desaccord avec eux non forcément sur ce qu’ils disent, mais sur le cadre de discussion même qu’ils adoptent, et je voudrais essayer de mettre le doigt sur ce desaccord philosophiques, en espérant initier une discussion (mais comme je suis “old school”, ce sera par blog plutôt qu’en vidéo). Ce n’est pas toujours facile d’exprimer exactement ce qui me gène, mais un bon point de départ est l’idée que l’on peut attribuer des degrés de crédence à n’importe quelle croyance (la consistance de l’arithmétique de Peano, le réalisme moral, …) (ceci dit Lê ne semble pas y adhérer totalement, puisqu’il affirme dans le dernier axiome (au cours du débat sur le réalisme moral) que ça ne peut être applicable qu’aux croyanc

Faut-il être libre pour connaître les lois de la nature ?

Je souhaite aujourd’hui croiser deux vieux débats : celui sur le libre arbitre, et sa compatibilité avec le déterminisme, et celui sur la connaissance modale. Le premier est peut-être plus familier à un certain nombre de lecteurs. Il s’agit de savoir si la notion de liberté humaine, si centrale dans nos vies (impliquée par exemple dans la notion de responsabilité morale, donc indispensable à toute conception éthique), est compatible avec l’idée que nous sommes déterminés par des lois. A-t-on besoin de penser qu’on « aurait pu faire autrement », en un sens littéral, pour penser la liberté ? Ou, comme le veulent les compatibilistes, est-il suffisant que nous soyons la source causale de nos actions (quand bien même les rapports causaux seraient déterminés) ? Le second débat concerne l’existence d’une nécessité dans la nature, justement impliquée dans la notion de « détermination par des lois » : certaines choses seraient possibles ou impossibles, parce que permises ou interdites par les

Extrême droite et islamisme, même combat

Nous vivons une époque tendue, traversée de contradictions à résoudre. Traversée de folie, avec des mouvements qu'apparemment tout oppose : le terrorisme islamiste et l'extrême droite européenne, qu'on verrait hâtivement comme les pires ennemis l'un de l'autre. Et cet état de fait est source de dilemmes moraux pour les pacifistes de tous bords. A ma droite, certain-e-s s'interrogent sur la bonne façon de dénoncer l'islamisme radical sans se voir accusé-e-s d'entretenir des idées xénophobes, c'est-à-dire de faire acte de complaisance envers l'extrême droite européenne. A ma gauche, d'autres se demandent comment assoir la lutte anti-raciste, l'oppression diffuse envers les musulmans d'occident, sans prétendre soutenir le terrorisme. Comme si deux démons voulaient nous imposer un choix impossible : soit être avec l'un, soit avec l'autre. Et la seule réponse acceptable, de tous bords, semble être la nuance : pas d'amalgames !

Qui a battu les meilleurs joueurs de go ? AlphaGo ou les ingénieurs de Google ?

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Qui a vraiment battu les meilleurs joueurs de go ? AlphaGo ou les ingénieurs de Google ? La réponse à cette question me semble évidente : ce sont des ingénieurs qui sont parvenus à battre les meilleurs joueurs de go à l'aide d'un programme informatique. Pourtant la tournure utilisée dans la quasi-totalité des comptes rendus de cette histoire dans les médias semble indiquer l'inverse : il est rapporté qu'un ordinateur (et non une équipe d'ingénieur) a remporté la victoire. Je comprends bien intuitivement cette tournure, mais elle me semble relever, à strictement parler, de l'abus de langage, et je pense que cet abus de langage n'est pas innocent mais au contraire assez problématique, principalement parce qu'il relève du sensationnalisme et ouvre la voie à des glissements fantasmatiques de toute sorte qu'on ferait mieux d'éviter si l'on veut se concentrer sur les véritables questions que pose la recherche en IA. Il ne s'agit pas d'a

Le faux problème de l'intelligence artificielle

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Y aura-t-il un jour une intelligence artificielle en tout point supérieure à l'homme ? Est-ce que ça arrivera prochainement ? Personnellement je donnerais mon assentiment aux deux réponses suivantes : oui bien sûr, et c'est déjà le cas depuis des décennies ! c'est très peu probable ; à ce jour il n'existe aucune intelligence artificielle, il faudrait déjà commencer par en créer une ! Je pense que ce sont les deux seules manières *intelligibles* de répondre à cette question mal posée, une fois la confusion sur le terme "intelligence" dissolue. De l'usage des métaphores Car ce terme inadéquat est à la source de beaucoup de confusions. Quand on parle d'intelligence à propos d'algorithmes, c'est toujours une métaphore, comme quand on dit "le distributeur de billets est intelligent, il a deviné ma langue à partir de ma carte bancaire et l'utilise pour l'interface" (en fait c'est le concepteur du programme qui est i

La réalité peut-elle buguer ? Ou pourquoi le monde n'est pas une simulation numérique.

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Le monde est-il une simulation numérique ? J'entends par là l'idée que la réalité serait un algorithme particulier qui produirait les phénomènes du monde, ou qu'elle serait une machine de Turing implémentant cet algorithme. Je pense qu'on peut définitivement rejeter cette idée pour la raison suivante : un algorithme est normé, mais les faits ne le sont pas. En effet, il me semble qu'une des caractéristiques essentielles d'un algorithme est qu'il peut-être bugué. Or qu'est-ce qu'un "bug"? Quelque chose qui n'est pas conforme à certaines règles ou normes. Mais l'idée que la réalité soit buguée, ou puisse l'être ou aurait pu l'être, n'a pas de sens : elle est telle qu'elle est. Donc le monde n'est pas une simulation numérique. Examinons cet argument dans les détails, afin de le rendre plus convaincant. 1. La réalité peut-elle "buguer" ? Commençons par accepter qu'un algorithme est normé (qu&#

Idée reçue : les théories scientifiques font des prédictions

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Une des conceptions les plus répandues à propos des sciences est l'idée que les théories scientifiques font des prédictions, et incidemment, qu'elles sont justifiées/corroborées par leur succès prédictifs (ou encore qu'elles sont "vraies jusqu'à preuve du contraire"). Or à strictement parler cette idée est fausse : ce ne sont pas les théories qui font des prédictions, mais leurs modèles. Par modèle j'entends une certaine configuration permise par la théorie qui est capable de représenter une situation particulière du monde, quand une théorie ne représente aucune situation en particulier mais exprime des généralités sur les rapports entre des propriétés hypothétiques du monde. Par exemple : la théorie de la relativité, qui exprime des rapports entre masse/énergie et géométrie de l'espace-temps, vs. un modèle de l'univers dans cette théorie. Il existe une infinité de modèles compatibles avec une même théorie, et il faut voir une théorie scientifi

Le paradoxe du rapport entre philosophie et science

Il y a quelque chose de paradoxale en philosophie, dans son rapport aux sciences, qui est que quoi qu’elle fasse, quelle que soit la position qu’elle adopte, elle semble ne pas pouvoir à la fois satisfaire et intéresser le scientifique (ou plutôt la figure du scientifique telle qu’on se l’imagine). On trouve ainsi une tradition « anti-réaliste » en philosophie, voire « relativiste ». Les théories scientifiques ne seraient que des instruments pour faire des prédictions ou développer des techniques, ce seraient des constructions relatives à notre position dans le monde. Elles seraient utiles plutôt que vraies. Et l’on peut y voir une forme de déni des sciences qui ne pourra satisfaire l’esprit scientifique : non, les affirmations théoriques ne sont pas de simples constructions de l’esprit, elles sont amplement confirmées par nos expériences, et il est rationnel de les croire. Fort bien. Alors soyons réalistes ! La métaphysique des sciences contemporaines est dominée par cette idée qu

L'addiction

L’addiction est un problème : nous désirons, satisfaisons nos désirs, puis nous accoutumons et voulons toujours plus. C’est un naufrage pour beaucoup. Mais la vie n’est au fond qu’une histoire d’addiction. Il y a l’addiction à des substances, bien sûr : l’alcool, le tabac, le cannabis, la cocaïne, l’héroïne, que sais-je… Mais aussi le café et le chocolat peut-être ? Puis il y a l’addiction aux jeux, au risque. À la violence ? Au sport, c’est-à-dire à l’effort physique. À la nature et aux grands espaces peut-être ? Au sexe et à la pornographie. À la nourriture, certainement. Au sommeil ? Au pouvoir et à l’argent. À l’attention des autres, à l’amour, aux relations sociales… À l’information. À l’indignation ! Nous n’en avons jamais assez. Et l’on pourrait défendre que les plaisirs intellectuels, voire spirituels et religieux, constituent, eux-aussi, une forme d’addiction. Alors il me semble que nous avons fait le tour des aspects de la vie humaine, et que ce problème, celui de l’addiction