Dichotomie fait/valeur, "looping effect" et objectivité
Existe-t-il des « faits » purs ?
Imaginez que quelqu'un vienne vous voir et vous dises de but en blanc « Napoléon est mort en 1821 ». Vous lui demanderiez une explication. La phrase, prise isolément, semble dénuée de sens. Le langage n'est jamais purement l'énonciation de faits, il vise un but et s'inscrit dans un contexte. Ainsi la même phrase peut valoir pour la récitation d'une leçon, pour répondre au questionnaire d'un jeu de société, pour situer le personnage historiquement dans le cadre d'une discussion historique, ou pour un autre but suivant le contexte. Bien sûr la phrase reçoit tout de même une interprétation minimale (on parle bien a priori du personnage historique, de la date de sa mort), même énoncée de but en blanc, mais cette interprétation reste spéculative et demande une explication. Il se pourrait même qu'on ait mal entendu ou que ce ne soit pas du tout ce qu'on pensait : la phrase ne prend sens que dans un contexte, et dans un contexte, elle vise nécessairement une fin.
Peut-on dissocier dans un fait énoncé la fin qu'il poursuit et son contenu factuel ? Un fait sera dit objectif s'il ne dépend pas de la personne qui l'énonce, ni de la façon dont il est mis au jour, mais d'une compréhension commune s'adaptant à un certain nombre d'observateurs et de situations. Il sera d'autant plus objectif que le nombre d'observateurs visés et de points de vue possible est grand. A l'inverse il sera dit subjectif s'il dépend crucialement de la manière dont il a été révélé et du contexte associé. Par exemple, dire d'un objet qu'il est vert est subjectif, puisque le même objet pourra se révéler de couleurs différentes suivant la lumière avec laquelle on l'observe, ou si nos yeux s'étaient habitués à une couleur rouge juste avant, ce qui déforme la vision des couleurs, et même pourra ne pas se révéler avoir de couleur du tout pour un aveugle : la propriété d'être vert se rapporte à des contextes d'observation. Dire par contre qu'il absorbe telle partie du spectre lumineux (ce qui lui donne effectivement une couleur verte dans des conditions « normales », pour les observateurs « normaux ») sera plus objectif.
Comme le montre Cassirer, la distinction entre ce qui est subjectif et objectif est obtenu par abstraction, et en tant que tel, l'objectivité s'appuie sur une théorie. Est-ce à dire que les faits scientifiques sont, si non dans leur fin au moment de l'énonciation, au moins dans leur contenu, et sinon actuellement, du moins dans l'idéal d'un progrès asymptotique, purement objectifs ?
Certes Putnam montre que les théories scientifiques s'appuient elles aussi sur des valeurs épistémiques (la simplicité, les symétries…) qui sont gage d'efficacité dans l'enquête scientifique. Mais encore une fois notre question porte plutôt sur le contenu que la façon dont il a été construit. Or à ce titre on pourrait penser que le contenu d'une théorie scientifique est parfaitement objectif. Seulement voilà : les théories ne sont pas les faits, elles ordonnancent les faits. Ainsi la théorie de l'évolution ne nous dit pas qu'il y a des mammifères et des oiseaux, elle nous dit qu'étant donné les mammifères et les oiseaux appartenant à une même filiation, leur évolution s'est produit par l'intermédiaire du mécanisme de sélection naturelle. Elle relie les faits plutôt que de les établir.
L'obtention des faits
Dirigeons nous alors sur la façon dont on obtient des faits. Pourquoi dit-on qu'ils sont objectif ? D'abord en vertu de leur lien avec une théorie qui nous garantie la systémacité de leur obtention. Mais voilà, la théorie nous dira : si tu fait telle manipulation, tu obtiendras tel résultat. Autrement dit, la théorie ne relierait-elle pas plutôt les faits à nos actes ? Et dans ce cas comment savoir alors si le fait est découvert ou créé ? Il faudrait que la théorie elle-même nous garantisse une certaine objectivité du fait, une certaine persistance indépendamment des différents accès possibles. Le peut-elle ?
Cette discussion paraîtra peut-être un peu tirée par les cheveux. Il est absurde d'affirmer que la lune est créée par notre regard. La géologie nous affirme qu'il existe des plaques continentales : voilà bien un fait. Certes, certes... Alors que reste-t-il de cette prétendue subjectivité inaliénable ?
Et bien voilà : les faits scientifiques, soit reposent sur des points de vues globaux, à propos desquels il faut être nominaliste, soit, si l'on se ramène au plancher des vaches, ne permettent plus d'obtenir une objectivité allant de soi. Il y a une raison simple à cela, qui tient aux conditions de l'objectivité. Rappelons qu'on parle d'un fait objectif quand on il n'est pas créé par la mesure qui permet de le révéler du moins que rien ne le laisse penser), tandis qu'on parle d'un fait subjectif quand il dépend, au moins en partie, de la façon dont il est mis en évidence, et donc d'un point de vue. Or la condition d'objectivité, la non contextualité, est aussi une condition de réductibilité.
En effet Kim montre que l'émergence est nécessairement nominale dans le cadre d'une clôture causale du monde physique. Il n'y a aucun sens à parler d'un niveau émergent causalement efficient si ce niveau est lui même causé par le niveau sous-jacent, puisqu'alors une lecture au simple niveau de base suffit. L'exception à cette règle, c'est le phénomène d'intrication en physique quantique, qui consiste en des relations non-supervenantes, c'est à dire une véritable émergence. Mais si dans ce cas on n'obtient pas de clôture causale, c'est parce que c'est une mesure globale qui révèle l'état intriqué, et donc en quelque sorte, l'émergence du système renvoie à l'émergence de l'observateur lui même (on peut bien sûr tenter de naturaliser l'observateur également, mais alors on abouti au problème de la mesure : l'observateur lui même semble être dans une superposition d'état, ce qui ne se vérifie jamais empiriquement « à la première personne »).
En résumé : on ne peut parler d'un système non réductible que dans le cadre d'une mesure contextuelle, c'est à dire si l'état du système n'est ni tout a fait révélé ni tout a fait créé par la mesure. Le « plancher des vaches » ne peut qu'être subjectif (ou plutôt issu d'un pôle de stabilité entre sujet et objet), et l'objectivité est issu d'un défaut de cohérence entre plusieurs éléments en relations, ce défaut de cohérence impliquant une réductibilité. Donc nos objets, pour peu qu'ils soient vraiment objectifs, sont aussi réductibles, mais alors leur délimitation est arbitraire.
Les plaques tectoniques existent peut-être objectivement, mais leur délimitation en tant qu'objet est subjective. Typiquement, il existera des plaques trop petites dont on ne sera que faire, ou mal séparées les unes des autres. On le voit avec la notion de planète, et le débat concernant pluton : tout comme il faut être nominaliste à propos des planètes (et de la lune) il faut être nominaliste à propos des plaques tectoniques, et de quoi que ce soit d'objectif (les espèces animales, ...).
Les faits sociaux
Pourtant on ne peut exclure que certains de nos objets sont irréductibles, mais alors ils sont subjectifs, cette fois dans un autre sens : parce qu'ils dépendent foncièrement du contexte d'observation. Ce cas ne concerne pas uniquement la microphysique. Il concerne en fait probablement la plupart de nos entités sociales, voire biologiques.
Ian Hacking parle du « looping effect » à propos de certains concepts en sciences sociales. Par exemple : le statut d'immigré clandestin fait-il référence à l'état objectif de certaines personnes, ou bien crée-t-il la réalité qu'il est censé référencer ? Les personnes, une fois reconnues comme telles, seront impactés par cette catégorisation. De même les malades mentaux. Ce type de catégorie ne semble pas totalement révélé, mais pas totalement construit non plus : plutôt s'agit-il de l'émergence d'un pôle de stabilité entre l'observation et l'objet observé – une contextualité dans la mesure, exactement comme ce qui se passe en physique quantique (Pour appuyer ces propos, Esfeld montre que le holisme sémantique de Quine est conceptuellement équivalent au holisme de la physique quantique).
On peut aussi voir que nos états mentaux, en fait tout ce qui est subjectif en général, obéit à une règle semblable : nos états mentaux sont autant révélés que créés par notre regard. Pas plus qu'il n'existe d'objectivité pur il ne peut exister de subjectivité pure. C'est typiquement le cas des états intentionnels qu'on attribut aux autres : ils sont à la fois fondé sur des "faits" et issus d'un regard subjectif. C'est ce que Putnam, justement, appelle des concepts éthiques épais, c'est à dire des enchevêtrements de faits et de valeurs.
Ainsi on peut peut-être parler à propos de nos catégories sociales aussi bien qu'à propos des états intentionnels d'état émergents irréductibles. Autrement dit, le « plancher des vaches » ne se situe pas forcément à l'échelle microscopique, mais peut être présent à tous les niveaux. La cohérence d'un organisme biologique peut très bien être émergente en ce sens. Mais alors cette cohérence est fondamentalement élusive : on ne peut pas parler d'objectivité à son propos, et tout ce qui peut être qualifié d'objectif à propos d'un organisme (l'ensemble de ses mécanismes) est a priori réductible à une réalité physique sous-jacente. Nous ne pouvons qu'osciller entre deux types de subjectivités opposés : le nominalisme et la contextualité des états. Or le nominalisme n'est qu'un autre type de contextualisme, plus fonctionnel : l'objet est isolé comme objet en vue d'une utilisation fonctionnelle. Ici, sa cohérence est apportée par notre regard et notre utilisation au lieu d'être « interne ».
L'idée de Putnam qu'il n'existe pas de dichotomie fait/valeur peut prendre une nouvelle tournure. Effectivement, il ne peut exister de fait pur, soit qu'il nous échappe, soit qu'il provient d'une instrumentalisation fonctionnelle. L'absence d'une dichotomie fait/valeur est typique d'éléments irréductibles, au fait qu'on ait atteint un plancher ontologique. On renvoie ainsi dos à dos l'instrumentaliste et le réaliste scientifique. L'un pense qu'une théorie scientifique est orientée valeurs, l'autre faits, alors qu'elle se situe à l'interface entre les deux.
Imaginez que quelqu'un vienne vous voir et vous dises de but en blanc « Napoléon est mort en 1821 ». Vous lui demanderiez une explication. La phrase, prise isolément, semble dénuée de sens. Le langage n'est jamais purement l'énonciation de faits, il vise un but et s'inscrit dans un contexte. Ainsi la même phrase peut valoir pour la récitation d'une leçon, pour répondre au questionnaire d'un jeu de société, pour situer le personnage historiquement dans le cadre d'une discussion historique, ou pour un autre but suivant le contexte. Bien sûr la phrase reçoit tout de même une interprétation minimale (on parle bien a priori du personnage historique, de la date de sa mort), même énoncée de but en blanc, mais cette interprétation reste spéculative et demande une explication. Il se pourrait même qu'on ait mal entendu ou que ce ne soit pas du tout ce qu'on pensait : la phrase ne prend sens que dans un contexte, et dans un contexte, elle vise nécessairement une fin.
Peut-on dissocier dans un fait énoncé la fin qu'il poursuit et son contenu factuel ? Un fait sera dit objectif s'il ne dépend pas de la personne qui l'énonce, ni de la façon dont il est mis au jour, mais d'une compréhension commune s'adaptant à un certain nombre d'observateurs et de situations. Il sera d'autant plus objectif que le nombre d'observateurs visés et de points de vue possible est grand. A l'inverse il sera dit subjectif s'il dépend crucialement de la manière dont il a été révélé et du contexte associé. Par exemple, dire d'un objet qu'il est vert est subjectif, puisque le même objet pourra se révéler de couleurs différentes suivant la lumière avec laquelle on l'observe, ou si nos yeux s'étaient habitués à une couleur rouge juste avant, ce qui déforme la vision des couleurs, et même pourra ne pas se révéler avoir de couleur du tout pour un aveugle : la propriété d'être vert se rapporte à des contextes d'observation. Dire par contre qu'il absorbe telle partie du spectre lumineux (ce qui lui donne effectivement une couleur verte dans des conditions « normales », pour les observateurs « normaux ») sera plus objectif.
Comme le montre Cassirer, la distinction entre ce qui est subjectif et objectif est obtenu par abstraction, et en tant que tel, l'objectivité s'appuie sur une théorie. Est-ce à dire que les faits scientifiques sont, si non dans leur fin au moment de l'énonciation, au moins dans leur contenu, et sinon actuellement, du moins dans l'idéal d'un progrès asymptotique, purement objectifs ?
Certes Putnam montre que les théories scientifiques s'appuient elles aussi sur des valeurs épistémiques (la simplicité, les symétries…) qui sont gage d'efficacité dans l'enquête scientifique. Mais encore une fois notre question porte plutôt sur le contenu que la façon dont il a été construit. Or à ce titre on pourrait penser que le contenu d'une théorie scientifique est parfaitement objectif. Seulement voilà : les théories ne sont pas les faits, elles ordonnancent les faits. Ainsi la théorie de l'évolution ne nous dit pas qu'il y a des mammifères et des oiseaux, elle nous dit qu'étant donné les mammifères et les oiseaux appartenant à une même filiation, leur évolution s'est produit par l'intermédiaire du mécanisme de sélection naturelle. Elle relie les faits plutôt que de les établir.
L'obtention des faits
Dirigeons nous alors sur la façon dont on obtient des faits. Pourquoi dit-on qu'ils sont objectif ? D'abord en vertu de leur lien avec une théorie qui nous garantie la systémacité de leur obtention. Mais voilà, la théorie nous dira : si tu fait telle manipulation, tu obtiendras tel résultat. Autrement dit, la théorie ne relierait-elle pas plutôt les faits à nos actes ? Et dans ce cas comment savoir alors si le fait est découvert ou créé ? Il faudrait que la théorie elle-même nous garantisse une certaine objectivité du fait, une certaine persistance indépendamment des différents accès possibles. Le peut-elle ?
Cette discussion paraîtra peut-être un peu tirée par les cheveux. Il est absurde d'affirmer que la lune est créée par notre regard. La géologie nous affirme qu'il existe des plaques continentales : voilà bien un fait. Certes, certes... Alors que reste-t-il de cette prétendue subjectivité inaliénable ?
Et bien voilà : les faits scientifiques, soit reposent sur des points de vues globaux, à propos desquels il faut être nominaliste, soit, si l'on se ramène au plancher des vaches, ne permettent plus d'obtenir une objectivité allant de soi. Il y a une raison simple à cela, qui tient aux conditions de l'objectivité. Rappelons qu'on parle d'un fait objectif quand on il n'est pas créé par la mesure qui permet de le révéler du moins que rien ne le laisse penser), tandis qu'on parle d'un fait subjectif quand il dépend, au moins en partie, de la façon dont il est mis en évidence, et donc d'un point de vue. Or la condition d'objectivité, la non contextualité, est aussi une condition de réductibilité.
En effet Kim montre que l'émergence est nécessairement nominale dans le cadre d'une clôture causale du monde physique. Il n'y a aucun sens à parler d'un niveau émergent causalement efficient si ce niveau est lui même causé par le niveau sous-jacent, puisqu'alors une lecture au simple niveau de base suffit. L'exception à cette règle, c'est le phénomène d'intrication en physique quantique, qui consiste en des relations non-supervenantes, c'est à dire une véritable émergence. Mais si dans ce cas on n'obtient pas de clôture causale, c'est parce que c'est une mesure globale qui révèle l'état intriqué, et donc en quelque sorte, l'émergence du système renvoie à l'émergence de l'observateur lui même (on peut bien sûr tenter de naturaliser l'observateur également, mais alors on abouti au problème de la mesure : l'observateur lui même semble être dans une superposition d'état, ce qui ne se vérifie jamais empiriquement « à la première personne »).
En résumé : on ne peut parler d'un système non réductible que dans le cadre d'une mesure contextuelle, c'est à dire si l'état du système n'est ni tout a fait révélé ni tout a fait créé par la mesure. Le « plancher des vaches » ne peut qu'être subjectif (ou plutôt issu d'un pôle de stabilité entre sujet et objet), et l'objectivité est issu d'un défaut de cohérence entre plusieurs éléments en relations, ce défaut de cohérence impliquant une réductibilité. Donc nos objets, pour peu qu'ils soient vraiment objectifs, sont aussi réductibles, mais alors leur délimitation est arbitraire.
Les plaques tectoniques existent peut-être objectivement, mais leur délimitation en tant qu'objet est subjective. Typiquement, il existera des plaques trop petites dont on ne sera que faire, ou mal séparées les unes des autres. On le voit avec la notion de planète, et le débat concernant pluton : tout comme il faut être nominaliste à propos des planètes (et de la lune) il faut être nominaliste à propos des plaques tectoniques, et de quoi que ce soit d'objectif (les espèces animales, ...).
Les faits sociaux
Pourtant on ne peut exclure que certains de nos objets sont irréductibles, mais alors ils sont subjectifs, cette fois dans un autre sens : parce qu'ils dépendent foncièrement du contexte d'observation. Ce cas ne concerne pas uniquement la microphysique. Il concerne en fait probablement la plupart de nos entités sociales, voire biologiques.
Ian Hacking parle du « looping effect » à propos de certains concepts en sciences sociales. Par exemple : le statut d'immigré clandestin fait-il référence à l'état objectif de certaines personnes, ou bien crée-t-il la réalité qu'il est censé référencer ? Les personnes, une fois reconnues comme telles, seront impactés par cette catégorisation. De même les malades mentaux. Ce type de catégorie ne semble pas totalement révélé, mais pas totalement construit non plus : plutôt s'agit-il de l'émergence d'un pôle de stabilité entre l'observation et l'objet observé – une contextualité dans la mesure, exactement comme ce qui se passe en physique quantique (Pour appuyer ces propos, Esfeld montre que le holisme sémantique de Quine est conceptuellement équivalent au holisme de la physique quantique).
On peut aussi voir que nos états mentaux, en fait tout ce qui est subjectif en général, obéit à une règle semblable : nos états mentaux sont autant révélés que créés par notre regard. Pas plus qu'il n'existe d'objectivité pur il ne peut exister de subjectivité pure. C'est typiquement le cas des états intentionnels qu'on attribut aux autres : ils sont à la fois fondé sur des "faits" et issus d'un regard subjectif. C'est ce que Putnam, justement, appelle des concepts éthiques épais, c'est à dire des enchevêtrements de faits et de valeurs.
Ainsi on peut peut-être parler à propos de nos catégories sociales aussi bien qu'à propos des états intentionnels d'état émergents irréductibles. Autrement dit, le « plancher des vaches » ne se situe pas forcément à l'échelle microscopique, mais peut être présent à tous les niveaux. La cohérence d'un organisme biologique peut très bien être émergente en ce sens. Mais alors cette cohérence est fondamentalement élusive : on ne peut pas parler d'objectivité à son propos, et tout ce qui peut être qualifié d'objectif à propos d'un organisme (l'ensemble de ses mécanismes) est a priori réductible à une réalité physique sous-jacente. Nous ne pouvons qu'osciller entre deux types de subjectivités opposés : le nominalisme et la contextualité des états. Or le nominalisme n'est qu'un autre type de contextualisme, plus fonctionnel : l'objet est isolé comme objet en vue d'une utilisation fonctionnelle. Ici, sa cohérence est apportée par notre regard et notre utilisation au lieu d'être « interne ».
L'idée de Putnam qu'il n'existe pas de dichotomie fait/valeur peut prendre une nouvelle tournure. Effectivement, il ne peut exister de fait pur, soit qu'il nous échappe, soit qu'il provient d'une instrumentalisation fonctionnelle. L'absence d'une dichotomie fait/valeur est typique d'éléments irréductibles, au fait qu'on ait atteint un plancher ontologique. On renvoie ainsi dos à dos l'instrumentaliste et le réaliste scientifique. L'un pense qu'une théorie scientifique est orientée valeurs, l'autre faits, alors qu'elle se situe à l'interface entre les deux.
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